Explication

Kinshasa éclipsée

Un trimestre a passé sans que je ne prenne ici le temps d’un billet. Voilà pourquoi :

J’ai piqué mon manuscrit d’un point pas si final, je l’ai lu, corrigé, relu, fait relir, recorrigé, relu encore, et encore, et encore une dernière fois. Enfin je l’ai porté dans une petite boutique en sous-sol, près de l’université, où l’on m’en a imprimé et relié quinze exemplaires. Je suis rentré chez moi avec, à bout de bras, vingt kilos de would-be littérature boudinée de plastique blanc. Il faisait chaud, l’air avait des odeurs d’achèvement, le ciel très bleu éblouissait, les tilleuls enneigeaient les trottoirs. J’ai choisi quinze éditeurs, rédigé les quinze lettres d’accompagnement, acheté les quinze enveloppes, vérifié les quinze adresses, écrit les quinze adresses, revérifié les quinze adresses. J’étais prêt.

Il y avait deux coquilles dans les deux premières pages.

Devenir écrivain, c’est apprendre le temps long, le travail infinitésimal, l’humilité de la fourmi, empiler des atomes en espérant la montagne. C’est apprendre à se savoir aveugle. Et — c’est peut-être là le plus important — à se servir de la Machine à Boudiner.

Je reviens bientôt.

2 réflexions au sujet de « Explication »

  1. et l’imprimante trop faible et la photocopieuse trop sale et le sac de courses et le ferry et la longue route et l’enveloppe en trop et le bureau de poste marseillais ! on croise on croise on croise les doigts

Répondre à Manu Annuler la réponse.

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *